mercredi 25 novembre 2009

Pourquoi des entretiens ? Comment ça se passe ?

Je souhaite donner ici quelques explications quant au déroulement des entretiens, car je reçois beaucoup de questions à ce sujet. J'utilise une méthodologie qui peut sembler « peu orthodoxe » ou inhabituelle, bien qu'elle soit de plus en plus utilisée en sociologie, et qui mérite quelques précisions.

Les questionnaires et les entretiens sont une part très importante de l'enquête, puisqu'il permettent d'obtenir des informations que l'on ne trouve pas ailleurs actuellement en France, ou seulement de façon partielle. Cela pour la simple raison qu'il n'y a pas eu de recherche ou d'enquête d'envergure sur le sujet. Certaines associations lancent des enquêtes pour pallier ce manque, notamment au sujet de la santé. Les sciences humaines commencent tout juste à s'intéresser aux questions trans', à l'exception de la psychanalyse - et la psychiatrie, qu'on peut considérer en partie comme une science humaine bien qu'elle fasse partie de la médecine. La grande majorité des travaux sur la question sont le fait de ces deux disciplines. Cependant il est délicat de les utiliser comme sources d'information sur les trans' - je reviendrai une autre fois sur ce point.
Les questionnaires permettent de recueillir essentiellement des informations factuelles et précises (à propos des transitions par exemple, de la situation familiale des personnes, etc.). Mais cela ne saurait suffire pour mon sujet : un questionnaire est nécessairement partiel et partial, d'abord parce qu'un choix est fait à propos des questions posées (pour des raisons de temps et de « ciblage » de l'information), ensuite parce que les personnes sont amenées à répondre selon le cadre imposé par le questionnaire ( certaines questions, qui seront significatives pour certaines personnes, ne le seront pas pour d'autres, par exemple). Il m'a donc semblé important de réaliser des entretiens en parallèle des questionnaires. J'ai choisi d'utiliser la méthode de l'entretien non-directif, qui consiste à laisser la personne s'exprimer le plus librement possible, et non selon un déroulement imposé. Le plus souvent, les gens s'attendent à ce que je leur soumette une liste de questions, comme dans une interview ou un questionnaire, et sont parfois déstabilisés de constater que ce n'est pas le cas ! En réalité l'entretien prend la forme d'une discussion dans laquelle c'est la personne « enquêtée » qui choisit l'angle sous lequel elle souhaite aborder les choses, en fonction de qui elle est, de son vécu, de ce qui a du sens pour elle au moment de l'entretien. Ainsi les entretiens sont tous différents les uns des autres. Une personne va beaucoup parler des relations avec sa famille, par exemple, parce que c'est cela qui est significatif pour elle, pour diverses raisons. Une autre, au contraire, en parlera peu, voire pas du tout, et orientera la discussion sur son engagement militant, ou sur son parcours de transition, ou sur autre chose encore.

Bien sûr, on peut me rétorquer à juste titre que malgré cela un entretien n'est jamais totalement « non-directif », ou « non-orienté », ne serait-ce que par la relation que j'instaure avec la personne, les relances et les interventions que je fais au cours de la discussion. Tout cela est à prendre en compte dans mon analyse des entretiens. L'idée de « non-directivité » constitue donc plutôt un horizon dont il s'agit de s'approcher le plus possible.

L'idée principale qui sous-tend le choix de cette méthode est la volonté de limiter au maximum l'influence éventuelle de mon propre cadre de référence sur les entretiens. Il s'agit de ne pas parler à la place de, ou sur, mais de laisser parler et de relayer cette parole. Les personnes trans', comme beaucoup d'autres catégories de population minoritaires, discriminées ou stigmatisées, sont très souvent parlées (par d'autres, qui détiennent une légitimité dans l'espace public et scientifique et s'arrogent une expertise sur le sujet), et ont beaucoup moins souvent l'occasion de parler elles-mêmes – et lorsqu'elles le peuvent, leur discours est rarement entendu et pris au sérieux. En tant que sociologue il est important pour moi de tenter d'éviter cet écueil, d'autant plus que je ne suis pas trans' moi-même. Et quand bien même je le serais, mon expérience personnelle ne saurait avoir valeur d'expertise.


En ce qui concerne les détails plus concrets :

  • les entretiens sont enregistrés avec un magnéto, pour que je puisse ensuite les retranscrire. Cela m'évite d'avoir à prendre des notes pendant l'entretien (et de toute façon il serait impossible de tout noter !) et d'être entièrement disponible dans la discussion. Ces enregistrements sont « privés », au sens où personne d'autre que moi ne les écoutera.

  • Les retranscriptions sont anonymes : vos noms et prénoms ainsi que tous ceux que vous pourrez éventuellement citer, de même que les lieux, sont changés, afin que l'on ne puisse pas vous reconnaître dans les citations qui seront incluses dans la thèse. Je suis donc la seule personne à savoir qui vous êtes.

  • La plupart du temps, les entretiens ont lieu au domicile de la personne, ce qui évite que vous ayez à vous déplacer. Toutefois il arrive que cela ne soit pas possible pour diverses raisons, ou que la personne ne le souhaite pas, et dans ce cas l'entretien a lieu dans un café, plus rarement chez moi.

  • Certaines personnes souhaitent parfois me rencontrer une première fois avant l'entretien, pour faire connaissance. Cela ne me pose aucun problème, donc n'hésitez pas à me le demander (je précise que ce n'est possible que pour les personnes habitant Paris et la région parisienne, car je ne peux me permettre des déplacements multiples).

J'espère avoir répondu à la plupart des interrogations ! Si vous avez d'autres questions, n'hésitez pas.

FTMsociologie@gmail.com

mardi 24 novembre 2009

ANNUAIRE des associations trans'/transsexuelles/transgenres en France (en construction)

PARIS :
  • ACT UP, Association de lutte contre le SIDA, créée en 1989.
  • ARDHIS, Association pour la reconnaissance des droits des personnes homosexuelles et transsexuelles à l'immigration et au séjour (créée en 1998).
  • ASSOCIATION BEAUMONT CONTINENTAL, entraide et soutien pour transgenre MtF uniquement (contacts en régions).
  • CARITIG, Centre d'Aide, de Recherche et d'Information sur la Transsexualité et l'Identité de Genre, créé en 1998. Aide, recherche et information.
  • Le MAG, jeunes gays, lesbiennes, bis et trans. Créée en 1985, officiellement association trans depuis 2008. Accueil, écoute, lutte contre l'homophobie en milieu scolaire.
  • ORTrans (Objectif Respect Trans), créée en 2009. Information, aide, actions..
  • OUTRANS, créée en 2009. Information, convivialité, sensibilisation, actions...
  • LES PANTHERES ROSES, "Gouines, trans et pédés énervéEs par l’ordre moral, le patriarcat, le sexisme, le racisme, le tout-sécuritaire, les régressions sociales et tout ça."
  • PASTT, Groupe de Prévention et d'Action pour la Santé et le Travail des Transsexuel(le)s (contact : pastt@noos.fr)
  • TRANS'AIDE, Association Nationale Transgenre, créée en 2004. Information, assistance, actions... A Nancy, Paris, Toulouse et Lille.

LILLE :
  • C'EST PAS MON GENRE, créée en 2006, "Groupe Trans Lillois à destination des personnes trans au sens large (personnes voulant se faire opérer ou non, hormoner ou non, ou se situant entre les genres), des personnes en questionnement, et de leur entourage". Promotion de l'intégration et de la visibilité des personnes trans.
NANTES :
  • LES AUTRES GENRES (l'association n'a pas de site Internet, elle est hébergée par le centre LGBT de Nantes)
BORDEAUX :
STRASBOURG :
  • STS, Support Transgenre Strasbourg, créée en 2002. Aide et information.
TOURS :
  • ETT, Entraide Transgenre Tours, créée en 2005 sur le modèle de STS.
LYON :
  • CHRYSALIDE, étude/formation/information, lutte contre l'exclusion et pour l'intégration, promotion de la culture transidentitaire.
MONTPELLIER :
  • PinkFreakX, collectif de militantEs transpédégouines montepellierain.
  • GEST, Groupe d'Etude sur la Transidentité, créé en 2007. "étude, formation et information relatives aux problématiques inhérentes à l’identité de genre; lutte contre l’exclusion et aide à l’intégration des personnes transidentitaires dans leur environnement familial, social et économique". (pas de site internet. transidentite@gmail.com)
  • TRANS'ACT ! information, aide, actions...
DIJON :
  • CIGALES, association LGBT de Dijon. Organise des permanences d'accueil pour les personnes trans.
METZ :

Les associations ou collectifs
qui ne sont plus en activité mais dont les sites sont toujours consultables :
  • AAT, Association d'Aide aux Transsexuels (Marseille)
  • SANS CONTREFACON (Marseille)
  • ASB, Association du Syndrôme de Benjamin : Transidentité, le site de Tom Reucher
  • GAT, Groupe Activiste Trans
D'autres sites :
  • V.I.T.E., Veille Internet TranssexuellE, créé en réaction aux articles et livres publiés sur le sujet des transidentités.
  • Bistouriouioui, "La radio faite par des trans pour les trans et...pour tout le monde !"

lundi 23 novembre 2009

Suite à quelques soucis techniques, j'ai du déménager mon blog. Me voilà donc à présent sur Blogger, et pour l'instant, tout se passe bien !

Merci beaucoup à toutes les personnes qui ont déjà répondu aux questionnaires, vos réponses vont m'être très utiles ! Je suis très motivée de voir que cela marche bien. Certain-es ont trouvé que certaines questions étaient trop fermées, et que le questionnaire ne prenait pas assez en compte les personnes ayant terminé leur transition. Je vais donc réfléchir à la manière de le faire évoluer pour le rendre plus adapté et plus efficace. Continuez à faire des commentaires, c'est très important !
Le questionnaire "conjoint-es" est presque fini, je me dépêche pour pouvoir le mettre en ligne le plus vite possible !

MEMOIRE

Vous pouvez lire et télécharger ci-dessous le mémoire que j'ai effectué il y a un an, qui s'intitule "Entrer dans la maison des hommes. De la clandestinité à la visibilité : trajectoires de garçons trans'/FtM". Il s'appuie sur une enquête auprès de 11 personnes (8 FtM et 3 MtF).

http://www.scribd.com/doc/22976411/entrerdanslamaisondeshommes

ENQUETE

Ma thèse s'appuie sur une enquête auprès de personnes trans', FtM mais aussi MtF. Car lire des livres et des articles ne suffit pas ! Et actuellement, aucune enquête française concernant les FtM n'a été effectuée. Il est donc très important de recueillir l'expérience et le point de vue des individus, pour comprendre les spécificités de leurs parcours, de leurs ressentis, de leurs difficultés aussi.

Je recherche donc plusieurs « profils » de personnes afin de réaliser ces entretiens :
  • - des personnes trans' FtM (trans', transsexuels, transgenres, FtX, FtU... toutes les identités sont concernées !), de tous âges et à divers « stades » de transition (y compris si la transition n'est pas encore commencée) ;

  • - des personnes trans' MtF (de même que pour les FtM, sans restriction identitaire), de tous âges et à divers « stades » de transition (de même, y compris si la transition n'est pas commencée) ;

  • - des parents, frères, soeurs, enfants et conjoint-es de personnes trans' FtM.

Les entretiens sont anonymes. Je vis à Paris, mais je peux me déplacer le cas échéant.

Si vous êtes concerné-e par le sujet et acceptez de me partager votre témoignage, ou si vous désirez plus d'informations concernant mon travail, contactez-moi à l'adresse suivante : FTMsociologie@gmail.com.

Pour plus de détails concernant le déroulement des entretiens, lire l'article "Pourquoi des entretiens ? Comment ça se passe ?".


Outre les entretiens, mon enquête s'appuie également sur trois questionnaires, dans le but de recueillir des informations sur le vécu et le point de vue d'un nombre plus important de personnes, dans un rayon géographique plus large.
Les questions concernent la transition proprement dite et son vécu, mais aussi les relations avec l'entourage (famille, ami-es, milieu professionnel...), les situations de transphobie et la visibilité des personnes trans' et des transitions : comment et quand en entend-on parler, quelles informations, quelles images, quelles représentations sont disponibles, quel(s) impact(s) cette visibilité (ou invisibilité) a-t-elle sur les parcours personnels...

Le premier questionnaire est à destination des personnes trans', FtM et MtF - sans critères d'âge, de transition ni d'identification : que vous soyez transgenre, transsexuel-le, trans', FtX, FtU ou quelle que soit la manière dont vous définissez et communiquez votre identité de genre. En revanche, le questionnaire ne s'adresse pas aux personnes intersexes, mon travail étant ciblé sur les transitions n'ayant a priori pas de lien avec une anatomie intersexe.

Questionnaire destiné aux personnes trans (FtM et MtF) :
link


Le second s'adresse aux parents de personnes trans', et le troisième (en cours de préparation) aux conjoint-es de personnes trans'. Ces deux questionnaires ont aussi pour but de recueillir des informations sur la visibilité trans', et sur les liens entre cette visibilité et la manière dont on vit la transidentité de l'autre, qu'il s'agisse de son enfant ou de son partenaire.

Questionnaire destiné aux parents de personnes trans :
link


Il faut environ 20 minutes pour répondre à un questionnaire.
Merci, d'avance, pour vos réponses !

POURQUOI CE SUJET ?

Voilà une question (légitime) qui revient sans cesse, sans doute plus que si j'avais choisi un sujet plus "conventionnel", moins "marginal".
Je ne pense pas que l'on choisisse "par hasard" un sujet de thèse, sujet sur lequel on s'engage à travailler pendant plusieurs années et avec lequel on va "vivre" d'une certaine manière (même si la vie d'un-e doctorant-e ne se limite heureusement pas à son travail !). Le choix de mon sujet s'est construit progressivement. Il est lié en partie à mes propres interrogations sur mon identité de genre. Je ne suis pas moi-même trans', au sens où je n'ai pas fait de transition et où mon identité sociale est féminine. Pourtant, être une femme parce qu'on est né-e de sexe féminin (ou femelle) ne m'a jamais semblé aller de soi, et je me suis toujours définie (plus ou moins facilement) "ailleurs", "autrement". Je me définis volontiers comme lesbienne féministe et c'est là, actuellement en tout cas, une identité qui me convient bien.
J'ai commencé par m'intéresser à ce que les Américains appellent les Female Masculinities, les identités masculines chez les personnes nées de sexe féminin. J'ai été frappée, en commençant des études spécialisées en "genre", par le vide existant en France sur ce sujet. La notion même de Female Masculinity n'est pas traduite et quasiment pas utilisée par les chercheur-es français. Je ne trouvais rien sur ce sujet, excepté des évocations très sporadiques et très peu développées.
Parallèlement, je militais dans des associations féministes et LGBT où je pouvais constater que la question du genre masculin chez les "femmes" ou les "filles" était le plus souvent éludée, non prise en considération. Et lorsqu'elle l'était, cela suscitait des réactions de crainte ou de rejet que j'avais du mal à comprendre. L'idée était assez répandue (et elle continue à l'être) que les femmes masculines, les butches, les FtM "trahissent" la cause féministe.J'observais aussi un certain "sectarisme" entre les féministes d'un côté, les lesbiennes et les gays d'un autre, et les trans' encore ailleurs. Comme si tous ces individus n'avaient pas ou peu d'intérêts communs.
De fil en aiguille, de lecture en questionnements, j'en suis donc arrivée à l'envie de faire une recherche sur les identités FtM, pour essayer de comprendre pourquoi et comment ces identités sont invisibilisées. Encore aujourd'hui je suis effarée de rencontrer très souvent des personnes qui ignorent totalement l'existence des FtM...alors que celle des MtF est connue (bien qu'à travers des stéréotypes et des préjugés, le plus souvent). J'essaie d'aborder ce sujet avec, entre autres, une perspective féministe : la moindre visibilité des FtM a-t-elle un rapport avec une domination masculine ? Quels sont les liens entre les questions trans' et le(s) féminisme(s) ? Il s'agit aussi, bien sûr, de relayer la parole des intéressés et de déconstruire l'ignorance et les stéréotypes existant à leur sujet, afin de rendre visible ces questions et ces réalités dans le champ de la recherche. Lorsque l'on confronte la réalité des parcours trans', des représentations et des identifications, avec ce qu'en disent les psychiatres (qui détiennent le monopole des études sur le sujet), on s'aperçoit du décalage. Et ce décalage fait partie des questions à analyser.
J'ai soutenu en 2008 un mémoire de Master qui constitue en quelque sorte une introduction à la thèse que je suis en train de réaliser.